Chaque hiver, j'ai rendez-vous au versant Nord de l'Alaska dans le froid avec les ours polaires pour filmer leur comportement après avoir quitté la tanière, mais avant leur retour sur la banquise. L’amoncellement de neige recouvre la toundra à cette époque de l'année et l’ourse est cachée sous cette neige, avec ses petits jeunes encore trop fragiles pour s'aventurer dans l'environnement hostile de l'Arctique.
Face au réchauffement de la planète, nous qui étudions les ours polaires, avons pris soin de mesurer leur réaction dans leur habitat diminuant rapidement, (la calotte glaciaire a diminué de plus de moitié en l'espace de quatre décennies). Les ours polaires ont besoin de la glace pour chasser leur proie : le phoque. Comme la glace diminue, alors les populations d’ours diminuent.
Nous constatons les effets du réchauffement de la planète dans plusieurs aspects du cycle de vie des ours polaires. Comme un vétérinaire étudie un animal malade, nous constatons aujourd'hui beaucoup de problèmes : taille corporelle modidiée, portées d’oursons réduites…
J'ai eu le privilège d'étudier leur tanière dans le cadre d'une étude internationale sur les ours polaires, en mettant l'accent sur le temps qu’une ourse passe ensevelie sous la neige avec ses oursons : le long du versant nord de l'Alaska, nous constatons que les ours passent en moyenne plus de trois semaines de moins dans les tanières qu'auparavant. L’englacement de la mer retardé chaque année, retarde l’hibernation. Le fait que l’ourse et ses oursons quittent plus tôt leur tanière au printemps n’est pas dû à la fonte de la neige, mais très probablement au fait que la mère est si faible qu’elle ne peut attendre plus longtemps pour mener ses petits à maturité et doit quitter sa tanière sous peine d’y mourir.
Ainsi, elle part plus tôt exposant ses petits à l'environnement hostile de l'Arctique bien avant qu'ils ne soient prêts. En fin de compte, cela coûtera la vie aux oursons.
Parce que la glace diminue en étendue et en épaisseur, la femelle est à la recherche de tanières plus stables et plus sûres pour ses petits.
Une récente étude de l'USGS montre que les femelles gestantes doivent se déplacer beaucoup plus loin pour mettre bas, ce qui les éloigne encore plus de la banquise pour reprendre la chasse au phoque.
Cette longue migration coûte encore plus de précieuses calories et finalement peut faire la différence entre la vie et la mort.
Tout comme votre vétérinaire sait ce qui est bon pour votre animal de compagnie, les biologistes connaissent la solution pour les ours polaires : arrêter la perte de leur habitat. Ceci est seulement possible en abaissant la température de la planète pour que la banquise puisse leur fournir l'habitat dont ils ont besoin, en étendue et en épaisseur. Si la fonte se poursuit comme prévue actuellement, l'avenir est sombre pour cette espèce. Espérons que nous pouvons trouver la volonté de renverser cette tendance pour ce magnifique concitoyen de la planète terre avant qu'il ne soit trop tard.
Dr. Tom Smith.
Professor, Research Wildlife Biologist, Brigham Young University